Propriétaires d'un logement en location, il peut arriver que vous ayez à reloger vos locataires.
Qu'est-ce que le relogement des locataires ?
Le relogement du locataire est le corollaire du droit de jouissance du logement qui lui est concédé lors de la signature du bail. En matière de bail d'habitation pour les résidences principales, l'article 6 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 met à la charge du bailleur une obligation de délivrance d'un logement décent et conforme aux prévisions contractuelles.
Le logement :
- ne doit pas ne laisser pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé. Notamment, le logement doit être « exempt de toute infestation d’espèces nuisibles et parasites » (précision apportée par la loi Élan n° 2018-1021 du 23 novembre 2018) ;
- doit répondre à un critère de performance énergétique minimale, précisé par le décret n° 2017-312 du 9 mars 2017 : étanchéité à l'air s'ajoutant à l'étanchéité à l'eau (depuis le 1er janvier 2018) + aération suffisante comprenant renouvellement de l'air et évacuation de l'humidité (depuis le 1er juillet 2018) ;
- doit être doté des éléments le rendant conforme à l'usage d'habitation ;
- doit être en bon état d'usage et de réparation, et les équipements mentionnés au contrat de location en bon état de fonctionnement.
Par ailleurs, le bailleur doit maintenir les locaux en état de servir à l'usage prévu par le contrat. Il doit également y faire toutes les réparations autres que locatives, nécessaires au maintien en état et à l'entretien normal des locaux loués.
Lorsque cette obligation de délivrance n'est plus remplie dans le logement initial, elle peut être maintenue sous la forme d'une obligation de relogement. Parfois, l'obligation de relogement a un fondement particulier justifié par la volonté de protéger une partie faible.
Bon à savoir : les autorités publiques disposent d’un pouvoir de police en matière de lutte contre l’habitat indigne et peuvent prendre des décisions contraignant les marchands de sommeil à effectuer des travaux dans un logement insalubre, le cas échéant sous astreinte (article L. 543-1 du Code de la construction et de l’habitation, modifié par la loi Élan n° 2018-1021 du 23 novembre 2018). La Loi Élan prévoit en outre que lorsqu’un bailleur a été obligé par les autorités publiques à mettre en conformité un logement loué avec la réglementation relative à la décence, les allocations logement ne peuvent lui être versées directement, et ce jusqu'à l'accomplissement des travaux (article L. 842-1 du Code de la construction et de l’habitation).
À noter : pour prouver qu’un logement n’est pas conforme aux caractéristiques d’un logement décent, démontrer que la surface de la pièce principale du bien est inférieure à 9 m2 n'est pas suffisant. Cette pièce doit aussi avoir un volume inférieur à 20 m3. À défaut, l’indécence du logement ne peut pas être retenue (Cass. 3e civ., 23 janvier 2020, n° 19-11.349).
Préjudice de jouissance Lire l'article
Relogement du locataire : dans quels cas ?
Il existe plusieurs situations dans lesquelles le bailleur est tenu de reloger le locataire.
Congé donné par le bailleur
Principe et exceptions
L'article 15 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 prévoit que le bailleur peut donner congé à son locataire pour trois raisons :
- décision de reprendre ou de vendre le logement ;
- motif légitime et sérieux (inexécution par le locataire de l'une des obligations lui incombant) ;
- vente de l'appartement.
Bon à savoir : depuis le 1er janvier 2018, en cas de reprise ou de vente du logement, le propriétaire doit joindre une notice d'information relative aux obligations du bailleur et aux voies de recours et d'indemnisation du locataire selon le modèle fixé par l'arrêté du 13 décembre 2017.
Il existe cependant une exception à ce principe :
- Le bailleur ne peut donner congé à un locataire âgé de plus de soixante-cinq ans et dont les ressources annuelles sont inférieures à un plafond de ressources.
- S'il le fait, il doit proposer au locataire un logement correspondant à ses besoins et à ses possibilités, dans les limites géographiques prévues à l'article 13 bis de la loi n° 481360 du 1er septembre 1948.
Cette obligation de relogement s'impose également lorsque le locataire a à sa charge une personne :
- de plus de soixante-cinq ans ;
- vivant habituellement dans le logement ;
- remplissant la condition de ressources précitée
Par ailleurs, pour que le relogement soit obligatoire, le montant cumulé des ressources annuelles de l'ensemble des personnes vivant au foyer doit être inférieur au plafond de ressources visé.
Bon à savoir : le plafond de ressources est fixé par un arrêté du 29 juillet 1987, actualisé chaque année.
L'âge du locataire de la personne à sa charge et celui du bailleur sont appréciés à la date d'échéance du contrat. Le montant de leurs ressources est apprécié à la date de notification du congé.
Ces dispositions ne sont pas applicables :
- si le bailleur est une personne physique âgée de plus de soixante-cinq ans ;
- ou si ses ressources annuelles sont inférieures au même plafond de ressources.
À noter : la loi Alur du 24 mars 2014 a abaissé l'âge à partir duquel l'offre de relogement doit être effectuée, passant de 70 ans à 65 ans. Néanmoins, pour les baux signés avant l'entrée en vigueur de cette loi, les dispositions de la loi Alur s'appliquent de manière rétroactive (Cass. 3e civ., 23 novembre 2017, n° 16-20.475). Ainsi, même si le bail a été signé avant le 24 mars 2014, le bailleur est tenu d'effectuer une offre de relogement au locataire de plus de 65 ans, et non de plus de 70 ans.
Type de local adapté au relogement
Le local mis à la disposition des locataires sortants doit satisfaire aux caractéristiques définies en application des règles fixées par l'article 6 de la loi du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs. Ils doivent correspondre aux besoins personnels, familiaux et professionnels des personnes à reloger.
Le relogement doit se faire dans :
- le même arrondissement, les arrondissements limitrophes ou les communes limitrophes de l'arrondissement où se trouve le local faisant objet d'une reprise ;
- le même canton ou dans les cantons limitrophes de ce canton, inclus dans la même commune ou dans les communes limitrophes de ce canton, si la commune est divisée en cantons ;
- pour les autres cas, sur le territoire de la même commune ou d'une commune limitrophe, sans pouvoir être éloigné de plus de 5 km.
Relogement en cas de congé pour vente à la découpe
Un accord du 16 mars 2005 prévoit, en cas de congés collectifs de vente (vente par lots de plus de 10 logements dans un même immeuble), une protection des locataires plus étendue que celle prévue par l'article 15-II de la loi du 6 juillet 1989.
En effet, le propriétaire doit proposer un relogement à certains locataires qui ne font pas valoir leur droit de préemption pour acquérir le bien. Il s'agit des locataires dont le revenu est inférieur au plafond de ressources applicable au prêt locatif intermédiaire. Si le locataire remplit cette condition, le congé doit lui être délivré avec une proposition de relogement. À défaut il est nul.
L'offre de relogement doit remplir les conditions citées au premier paragraphe III de l'article 15 de la loi du 6 juillet 1989.
Bon à savoir : ces dispositions ne sont pas applicables à tous les bailleurs. Les organismes HLM, les bailleurs personnes physiques et les sociétés civiles immobilières à caractère familial ne sont pas concernés.
Vente d'un lot de copropriété Lire l'article
Relogement en cas de logement insalubre
Il ne faut pas confondre travaux et insalubrité.
En effet, le locataire n'a pas obligatoirement à être relogé en cas de simples travaux :
- Il doit en souffrir l'exécution durant 21 jours, dès lors qu'ils sont urgents et ne peuvent être différés.
- Passé ce délai, le locataire peut avoir droit à la diminution du prix du loyer.
- Si les réparations rendent le lieu inhabitable, le locataire peut faire résilier le bail (article 1724 du Code civil).
En effet, l'article L. 521-3-1 du Code de la construction et de l'habitation (CCH) prévoit :
« Lorsqu'un immeuble fait l'objet d'une interdiction temporaire d'habiter ou d'utiliser ou que les travaux prescrits le rendent temporairement inhabitable, le propriétaire ou l'exploitant est tenu d'assurer aux occupants un hébergement décent correspondant à leurs besoins. »
Si le propriétaire de l'immeuble n'assure pas l'hébergement ou le relogement de ses locataires, le maire de la commune y pourvoit. Le coût est mis à la charge du propriétaire.
À noter : les locataires victimes de pratiques abusives et vivant dans un logement indécent peuvent dénoncer le propriétaire via une plateforme d’accompagnement accessible en appelant le 0806 706 806. Une assistance sera proposée aux victimes pouvant aller jusqu'à l’envoi des services de la mairie ou de la police du logement.
Enfin, le propriétaire ou l'exploitant est tenu d'assurer le relogement des occupants lorsqu'un immeuble fait l'objet (article L. 523-3-1 du CCH) :
- d'une interdiction définitive d'habiter ;
- d'une évacuation à caractère définitif.
L'offre de logement doit correspondre aux besoins et possibilités du locataire. Le propriétaire ou l'exploitant est tenu de verser à l'occupant évincé une indemnité d'un montant égal à trois mois de son nouveau loyer et destinée à couvrir ses frais de réinstallation. Encore une fois, si le propriétaire ne le fait pas, le maire y pourvoit. Les frais restent à la charge du bailleur.
À noter : dans ce cas précis, et même si le locataire demande la résiliation du bail, le propriétaire est tenu de respecter ces obligations.
Relogement dans le cadre d'une location HLM
Par ailleurs, depuis la loi Élan du 23 novembre 2018, la situation des locataires de logements sociaux en zone tendue est réexaminée tous les trois ans par les organismes HLM, à compter de la date de signature du contrat de location. Sont transmis à la commission d'attribution des logements les dossiers des locataires qui sont dans l'une des situations suivantes :
- sur-occupation du logement telle que définie à le nouvel article L. 822-10 du Code de la construction et de l'habitation (créé par l'ordonnance n° 2019-770 du 17 juillet 2019) ;
- sous-occupation du logement telle que définie à l'article L. 621-2 du Code de la construction et de l'habitation ;
- logement quitté par l'occupant présentant un handicap, lorsqu'il s'agit d'un logement adapté ;
- reconnaissance d'un handicap ou d'une perte d'autonomie nécessitant l'attribution d'un logement adapté aux personnes présentant un handicap ;
- dépassement du plafond de ressources applicable au logement.
La commission formule ensuite des propositions de relogement aux locataires dont la situation a été modifiée.
Bon à savoir : la liste des communes dites en « zone tendue » a été élargie par le décret n° 2023-822 du 25 août 2023.