
Afin de valoriser leur patrimoine foncier et d'y faire réaliser des installations à moindres frais, les collectivités territoriales ont la possibilité de le louer par le biais du bail emphytéotique. On parle dans ce cas de bail emphytéotique administratif (BEA).
Il s'agit d'un outil pour collectivités locales, apparenté aux partenariats entre public et privé, permettant de financer la construction d'édifices à vocation publique. Le BEA n'est pas soumis aux règles de mise en concurrence des marchés publics mais doit avoir pour but l'intérêt général.
La définition du BEA, tout comme sa mise en œuvre, ont évolué dans le cadre de la réforme de la commande publique issue de l'ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics et de l'ordonnance n° 2016-65 du 29 janvier 2016 relative aux contrats de concession.
Bail emphytéotique administratif dédié aux collectivités locales et à l'intérêt général
Le bail emphytéotique est défini par l'article L. 451-1 du Code rural. Il se caractérise par sa longue durée, de 18 à 99 ans. Quand le bailleur est une collectivité territoriale, on parle de BEA, qui doit respecter une vocation d'intérêt général. L'emphytéote ou preneur se charge de faire réaliser de nouvelles installations.
Seules les collectivités locales peuvent être bailleresses
L'article L. 1311-2 du Code général des collectivités territoriales (CGCT) prévoit la possibilité pour une collectivité territoriale de louer à un tiers un terrain ou un bien immobilier public ou privé lui appartenant pour qu'il y construise un bâtiment par le biais du BEA.
Le bailleur peut être une collectivité territoriale, un établissement public des collectivités territoriales ou un groupement de collectivités. Seules les collectivités locales peuvent passer un BEA. L'État ne peut pas être bailleur, ni la Sécurité sociale, ni aucun autre organisme national.
En revanche, l'emphytéote ou preneur peut être une personne morale publique comme une entité de droit privé, que ce soit une personne morale ou une personne physique.
À noter : la commune, même bailleresse, ne peut être maître d'ouvrage ni avoir aucun droit de regard sur l'ouvrage.
Opération à but d'intérêt général
Un BEA n'est valide que si l'opération dont il est le but entre dans le champ de compétences du propriétaire ou est à visée cultuelle. L'article L. 1311-2 du Code général des collectivités territoriales prévoit en effet que le preneur doit construire un édifice ayant pour vocation la réalisation d'une opération d'intérêt général relevant de la compétence du bailleur ou l'affectation à une association cultuelle d'un édifice du culte ouvert au public
Avant 2016, les ouvrages pouvaient servir la santé, le culte, l'armée (casernes). La Cour administrative de Lyon a même admis le 21 mai 2015 que la construction d'un centre commercial permettait d'étendre une zone d'activité et de générer de l'emploi.
Depuis l'ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015, les établissements publics de santé ne peuvent plus contracter de BEA (abrogation de l'article L. 6148-2 du Code de santé publique).
De même, les BEA de l’État pour les besoins de la justice, police, gendarmerie et défense (ancien article L. 2122-15 du Code général de la propriété des personnes publiques) ont été supprimés.
Pour pallier ces disparitions, des nouvelles catégories de marchés publics globaux sectoriels sont prévues aux articles L. 2171-4 et suivants du Code de la commande publique.
À noter : le contrat de bail peut prévoir précisément quels ouvrages devront être construits.
Bail pour une association Lire l'article
Conditions de publicité d'un bail emphytéotique administratif
Les règles de conclusion des BEA sont fixées par l'article L. 1311-2 du Code général des collectivités.
Si le BEA ne fait qu'autoriser une personne privée à occuper le domaine public (à l’exclusion de toute commande à titre onéreux de travaux, fournitures, services), il ne sera pas soumis aux règles relatives aux marchés publics ou aux concessions.
Au contraire, si le bail a pour objet l'exécution de travaux, la livraison de fournitures, la prestation de services ou la gestion d'une mission de service public, avec une contrepartie économique constituée par un prix ou un droit d'exploitation au profit d'un acheter public, il devra être envisagé sous la forme d'un marché de partenariat ou d'un contrat de concession et être soumis aux règles de publicité préalable et de mise en concurrence.
Bon à savoir : cette nouvelle définition des BEA s’oppose au traditionnel montage des « BEA aller-retour » qui intégraient une occupation du territoire, mais également une commande publique. Il n’est ainsi plus possible pour un pouvoir adjudicateur de commander la réalisation de travaux dans le cadre d’un BEA.
Un BEA doit être soumis au Conseil des communautés et à la Direction immobilière de l'État (ex France Domaine), puis rédigé et signé chez un notaire, avant d'être publié au Service de publicité foncière.
Bail emphytéotique administratif et obligations des parties pendant le bail
Le locataire a des droits réels sur le bien, notamment en termes de travaux. En effet, il assure la construction et l'entretien du bâti. En contrepartie, le loyer (redevance) est peu élevé.
L'emphytéote est également libre de sous-louer, il peut également passer un crédit-bail ou hypothéquer le bien loué. Il exploite librement l'ouvrage. Le Trésor public édite la taxe foncière au nom de l'emphytéote (II article 1400 CGI) pour le bâti et le non bâti au 1er janvier.
Au terme du bail, le bailleur récupère son bien et le cas échéant le nouvel édifice. Pendant la durée du BEA, le propriétaire encaisse les loyers.
À noter : les collectivités peuvent ainsi optimiser l'exploitation de leur foncier grâce au BEA.