Cession d'un bail emphytéotique

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Le bail emphytéotique est un bail de très longue durée qui confère au preneur des droits réels sur le bien immobilier loué. Ce bail peut être cédé, mais dans quelles conditions ? Le point sur la question.

Bail emphytéotique : définition

Le bail emphytéotique est régi par les articles L. 451-1 et suivants du Code rural et de la pêche.

Il s'agit d'un bail de très longue durée (de 18 à 99 ans), qui confère au preneur des droits réels immobiliers sur le bien loué et les constructions. Le preneur peut librement procéder à des changements de destination, à des transformations des locaux, sous réserve toutefois que ces changements n’entraînent pas une diminution de la valeur du fonds.

Le bail emphytéotique administratif (BEA), quant à lui, permet à une collectivité territoriale propriétaire d’un bien immobilier de le louer à un tiers qui pourra construire un ouvrage sur le domaine public soit en vue de la réalisation d’une opération d’intérêt général, soit en vue en vue de l'affectation à une association cultuelle d'un édifice du culte ouvert au public (article L. 1311-2 du CGCT). 

Bon à savoir : la définition du BEA, tout comme sa mise en œuvre, ont évolué dans le cadre de la réforme de la commande publique issue des ordonnances n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics et n° 2016-65 du 29 juillet 2016 relative aux contrats de concession. Notamment, le montage des BEA « aller-retour » (le bail ayant pour objet l'exécution de travaux, la livraison de fournitures, la prestation de services, ou la gestion d'une mission de service public, avec une contrepartie économique constituée par un prix ou un droit d'exploitation au profit d'un acheter public) devra être envisagé sous la forme d'un marché de partenariat ou d'un contrat de concession (et être soumis aux règles de publicité préalable et de mise en concurrence).

Cession du bail emphytéotique : conditions de fond

La liberté pour le preneur de céder le bail emphytéotique dont il est titulaire diffère, selon qu'il s'agit d'un bail emphytéotique ordinaire ou d'un bail emphytéotique administratif.

Bail emphytéotique ordinaire

Le preneur peut librement céder ses droits. De même, il peut librement les apporter à une société (article L. 451-1 alinéa 1 du Code rural). Selon la Cour de cassation (arrêt de la troisième chambre civile du 10 avril 1991), « le droit de libre cession constitue un caractère essentiel du bail emphytéotique ».

Il en résulte une interdiction de stipuler une clause qui organiserait, limiterait ou prohiberait la cession des droits réels que l'emphytéote tient du bail.

Exemple : une clause conditionnant la cession à l’autorisation préalable du bailleur.

En présence d’une telle clause, le bail emphytéotique serait requalifié en bail ordinaire.

La cession partielle du bail, par contre, ne sera possible que si elle est autorisée par le bailleur dans le contrat d'origine ou ultérieurement.

Bail emphytéotique administratif

Concernant le bail emphytéotique administratif, la cession et strictement encadrée par l'article L. 1311-3 du CGCT.

La cession du bail emphytéotique administratif n'est pas libre ; elle suppose :

  • l'agrément préalable de la collectivité territoriale bailleresse ;
  • que le cessionnaire soit substitué dans les droits et obligations mis à la charge de l’emphytéote, non seulement dans le contrat de bail, mais également dans les conventions non détachables conclues pour l'exécution du service public ou la réalisation de l'opération d'intérêt général.

À noter : le cessionnaire est donc tenu d'exécuter à compter du jour de l'entrée en jouissance toutes les charges et conditions du bail emphytéotique administratif.

Conditions de forme

La cession du bail emphytéotique, comme sa constitution, nécessite un acte notarié ou un écrit sous seing privé déposé au rang des minutes d'un notaire, avec reconnaissance d'écriture et de signature.

En effet, elle doit faire l'objet d’une publication au service de publicité foncière (ex-bureau des hypothèques) compétent aux fins d'opposabilité aux tiers, comme toute constitutif d'un droit réel immobilier consenti pour une durée supérieure à 12 ans (article 28 du décret du 4 janvier 1955 sur la publicité foncière).

Au surplus, la cession ou l'apport en société de ce droit devra, pour être opposable au bailleur, lui être signifiée conformément à l’article 1690 du Code civil.

Du point de vue fiscal, l'article L. 451-13 du Code rural dispose que « les mutations de toute nature ayant pour objet (…) le droit du preneur sont soumises aux dispositions du Code général des impôts concernant les transmissions de propriété d'immeubles. Le droit est liquidé sur la valeur vénale déterminée par une déclaration estimative des parties ».

La cession du bail emphytéotique sera soumise à la taxe de publicité foncière de 0,7 %, liquidée sur le prix exprimé, augmentée des charges pour la durée du bail (dans la limite de 20 années).

Bon à savoir : à cette taxe s'ajoute le prélèvement pour frais d'assiette et de recouvrement, ce qui porte le taux à 0,71498 %.

La cession du bail sera également soumise à la taxe sur la première cession à titre onéreux de terrains nus ou de droits relatifs à des terrains nus rendus constructibles.

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