Propriétaire d'un appartement donné en location, vous avez omis de récupérer les charges locatives.
Dans cette situation, il ne vous est pas possible de les réclamer n'importe quand. En effet, au bout d'un certain temps, vos locataires peuvent faire jouer la prescription des charges locatives. Le point maintenant.
Prescription des charges locatives : de quoi s'agit-il ?
Les charges d'un immeuble correspondent aux dépenses engagées pour le fonctionnement global de celui-ci.
En cas de logement donné à bail, elles doivent être réparties entre propriétaire et locataire :
- Les charges locatives sont celles dues par le locataire du fait de son occupation des lieux donnés à bail, en sus du loyer.
- Leur règlement est avancé par le propriétaire. Il lui appartient d'en obtenir le remboursement auprès du locataire.
Bon à savoir : depuis le 25 octobre 2020, lorsque l'immeuble est équipé d'une installation centrale de chauffage, de froid ou d'eau chaude sanitaire et qu'il est muni des dispositifs d'individualisation des frais télé-relevables, le bailleur doit transmettre au locataire (semestriellement ou trimestriellement sur demande du locataire, puis mensuellement à compter du 1er janvier 2022) une évaluation de la consommation de chaleur, de froid et d'eau chaude sanitaire de son local privatif (décret n° 2020-886 du 20 juillet 2020).
Elles correspondent aux frais liés à l'entretien du logement et des parties communes éventuelles. Une part est également affectée aux services rendus au profit de l'occupant.
Exemple : lorsqu'il existe un gardien dans l'immeuble où se situe le logement, et qu'il à en charge l'entretien des parties communes, les dépenses correspondant à sa rémunération et aux charges sociales et fiscales attachées sont exigibles au titre des charges récupérables à concurrence de 75 % de leur montant.
Autre exemple : la redevance d'enlèvement des ordures ménagères fait partie des charges locatives.
En matière de bail de droit commun (comme le bail donné pour un emplacement de parking seul ou une résidence secondaire, articles 1714 et suivants du Code civil), il n'existe pas de liste précise des charges locatives :
- Les critères retenus seront les mêmes, s'agissant de l'entretien de la chose et le service rendu à l'occupant.
- Ainsi, on fonctionne par assimilation avec la liste du décret ci-dessus.
La prescription correspond à l'écoulement d'un délai au terme duquel une action judiciaire ne peut plus être intentée et un droit est acquis.
Voyons plus en détail sous quels délais l'on peut réclamer le paiement des charges locatives.
Quel est le délai de prescription applicable pour le recouvrement des charges locatives ?
En réalité, tout dépend de la nature du bail.
Baux d'habitation soumis à la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989
Le délai applicable est de trois années depuis l'entrée en vigueur de la loi ALUR du 24 mars 2014, n° 2014-366.
L'article 7-1 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 dispose en effet :
« Toutes actions dérivant d'un contrat de bail sont prescrites par trois ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer ce droit ».
À noter : à ce titre, lors de la régularisation annuelle des charges locatives, si un solde apparaît en faveur du locataire et que le propriétaire ne rembourse pas ce trop payé, le locataire bénéficie d'une action en répétition de charges qui se prescrit au bout de 3 ans à compter du jour où le propriétaire lui a communiqué les pièces justifiant de ladite régularisation (Cass. 3e civ., 9 novembre 2017, n° 16-22.445).
Baux soumis au Code civil
La prescription est celle prévue par l'article 2224 du Code civil, qui dispose : « Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ».
Bon à savoir : dans les deux cas, le point de départ du délai est constitué par la connaissance, par le bailleur, de son droit. Les sommes réclamées doivent donc être exigibles et justifiées.
Prescription charges locatives : qu'est-ce que la révision de charges ?
Lorsque vous donnez à bail un logement ou que vous devenez locataire, deux possibilités existent en matière de charges : le forfait et la provision.
Le forfait équivaut à une somme définitive payable chaque mois au titre des charges locatives. Les charges locatives payées par le bailleur au delà du montant du forfait restent donc à sa charge.
Bon à savoir : un forfait, pour être rentable, doit être calculé au plus près des estimations réelles.
La provision sur charges correspond à une somme payable chaque mois selon une somme déterminée par avance. Une fois par an, le bailleur effectue ce que l'on appelle une régularisation des charges locatives. Il compare le montant réglé au montant exigible de charges grâce à l'établissement des comptes définitifs.
S'en suit alors soit une restitution du trop perçu soit une demande de règlement complémentaire.
Bon à savoir : en matière de bail soumis au Code civil, il n'existe aucune obligation particulière. Les deux formules sont possibles. Le délai de prescription des charges sera de cinq années, dans tous les cas.
En matière de bail d'habitation soumis à l'application de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 :
- Seuls les locaux meublés peuvent prévoir les deux formules (forfait ou provisions). Il est en effet impossible pour un logement loué vide de prévoir les charges au forfait.
- En cas de provision, si la régularisation des charges n'a pas été effectuée avant « le terme de l'année civile suivant l'année de leur exigibilité » (article 23 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989), le locataire peut demander un échéancier de règlement (douze mensualités maximum).
Par la suite, chaque année, les charges doivent être ré-évaluées en fonction des comptes précédents. Elles sont ainsi estimées au plus juste.
Il doit être relevé que le bailleur qui ne procède pas à la régularisation des charges et à la révision des provisions, ne perd pas son droit à recouvrement. Il peut réclamer les charges locatives durant la totalité du délai qui lui est imparti.
Toutefois, en cas de négligence de la part du bailleur entraînant un arriéré trop important, celui-ci peut être tenu à un aménagement plus long de la dette, et même à d'éventuels dommages et intérêts (Cass. 3e civ., 21 mars 2012, n° 11-14.174).